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Desaki / Sugino par Nikko

Merci à Nikko pour avoir rédigé cet article pour le site.

 

 L'influence de Dezaki et Sugino sur la série Lady Oscar 

 

Un petit article pour expliquer en quoi l'influence de ces deux grands noms de l'animation japonaise est fondamentale sur la série Lady Oscar.
Même le plus inculte d'entre nous qui regarderait la série pour la première fois se rendrait compte qu'entre les premiers épisodes et les derniers, il s'est passé quelque chose au niveau du rendu esthétique.

Exemple sur Fersen :

Capture d e cran 2014 04 17 a 11 59 50

 

Mais quoi donc ?  Le dessinateur s'est acheté des mains ? Le budget a brusquement triplé ?

Voyons cela de plus près...

La série TV Lady Oscar s'étale sur 40 épisodes ( excepté le résumé et l'épisode spécial qui court-circuite la fin ), et on peut les regrouper ainsi :
Episode 1 : réalisé par Shingo Araki, dessiné par Shingo Araki et Michi Himeno.
Episodes 2 à 18 : réalisés par Tadao Nagahama, et co-dessinés par Shingo Araki et Michi Himeno.
Episodes 19 à 40 : réalisés par Osamu Dezaki et dessinés par Akio Sugino, Shingo Araki et Michi Himeno.

Je laisse de côté l'épisode 1, car nous tomberions dans le HS étant donné qu'il faudrait au moins un article entier pour rendre hommage au travail d'Araki et Himeno.

Passons également sur les circonstances anecdotiques qui ont amené Dezaki et Sugino sur la série (en gros, Tadao Nagahama et la doubleuse japonaise d'Oscar ne pouvaient plus se supporter).

Pour tout ce qui tient à la biographie de Dezaki et Sugino, je vous renvoie à l'excellent site http://www.cobraworld.net qui répondra à votre curiosité.

Et maintenant, on peut y aller...

 

GRAPHISME  

En deux mots, on peut caractériser le trait de Sugino par un réalisme maximal lié à une grande fermeté, voire de la rugosité, mais avec une bonne dose de perfection dans la courbe. Un dessin d'anthologie, quoi !

Pour moi, les personnages de Sugino ont la force et la beauté d'une plante qui aurait poussé dans les meilleures conditions. En effet, chaque personnage de Sugino semble parfaitement adapté à son milieu, et y évolue sans aucune contrainte.
Même s'il doit dessiner un personnage condamné par la maladie ( Oscar dans Lady Oscar, Joe dans Ashita no Joe 2, Kaoru dans Très cher frère), celui-ci garde toujours une grande noblesse et il émane de lui autant de puissance que sans la maladie.
C'est vrai aussi que ses personnages sont en général gâtés par la nature, et donc très athlétiques et résistants. Ah, non, pardon, il y a Trelawney !

Contrairement à ce qui a pû être dit ailleurs, je ne trouve pas que Sugino s'attache à respecter les traits des manga qu'il adapte, et dans un sens, tant mieux, car Ace wo nerae par exemple est loin de la perfection. Je ne me permettrai pas de critiquer ici le graphisme d'Ikeda, mais si c'est elle-même qui a insisté pour que Sugino dessine l'anime de Très cher frère, c'est bien qu'il y a une raison ! Non, Sugino détourne à son avantage (et au nôtre) le graphisme des manga, en lui insufflant toute la force de ses dessins ce qui entraîne une cohérence admirable dans ses oeuvres. On retrouve les mêmes expressions chez Oscar que chez Joe ou chez Hiromi.

26 ans séparent ces deux dessins (Hiromi dans le film Ace wo Nerae, 1979) et Gerda (Yuki no Joô, 2005) et pourtant,
l'expression des deux personnages est rigoureusement la même, ce qui montre une grande rigueur dans les choix artistiques.

     

Gerda, "La Reine des neiges"                             Hiromi, "Ace wo Nerae"




Il est couramment admis que sur la série Lady Oscar, Sugino s'est occupé du character design des personnages secondaires, les principaux étant confiés au couple Araki/Himeno.
Cependant -et là, je ne fais que m'avancer car je n'étais pas dans les studios au moment de la création de la série-il me semble que leurs rôles n'ont pas dû être aussi distincts, tant le résultat visuel de ces épisodes est une fusion parfaite des trois styles.
On retrouve en effet toute la force, presque la bestialité, de certains personnages de Sugino, alliée à la grâce et à la finesse du trait de Michi Himeno.

     

Alain Delavigne                                   Jeanne de la Motte

Il apparaît évident que lors de cette collaboration, Araki, Himeno et Sugino se sont mutuellement influencés, et cela pour le reste de leur carrière, comme le souligne déjà Joe Gillian sur le site Cobraworld.

Enfin, on parle moins de Sugino que de Dezaki, car lui-même est moins médiatique et plus réservé. Cependant, je dois terminer par cette constation amère pour Dezaki : sans Sugino aux dessins, Dezaki serait allé beaucoup moins loin.
Il suffit de regarder des anime réalisés par Dezaki seul (comme la série Shin Ace wo nerae par exemple) : c'est franchement très moyen.



REALISATION 

La réalisation de Dezaki est en tout point adaptée au format de la série TV au budget souvent limité par rapport à un film cinéma ou une série d'OAV. En effet, si les contraintes techniques et financières brident beaucoup de réalisateurs, on peut dire que Dezaki les maîtrise et en joue à la perfection. Comment cela ?

Voici trois exemples d'illustration :

 

 EXEMPLES 

Tout d'abord par une excellente gestion du story board (quand c'est lui qui s'en occupe), avec des poses-clés très expressives.
Là où une scène animée est indispensable à d'autres, Dezaki arrive à retranscrire la même chose avec un plan fixe judicieusement choisi.

Voici l'exemple de la pose du personnage répliquant (c'est pas son vrai nom, hein !) que l'on retrouve dans tous ses anime. Les yeux fermés, en semi-réflexion, le personnage envoie une réplique à son interlocuteur. Au delà de la simple réponse, cette pose montre une énorme assurance, et la quasi certitude d'être dans le vrai.



  

Joe                                                         Black Jack

 


         
Ensuite, il faut remarquer l'extraordinaire gestion du temps dans les anime de Dezaki. C'est en grande partie ce qui fait que tous ses animes ont quelque chose en commun, et qu'on se sent chez nous, de "Lady Oscar" à "La reine des neiges" en passant par "Ashita no Joe 2" et "Ace wo nerae".
Dezaki est un maître des changements de rythme dans la narration, et alterne des moments contemplatifs avec des phases d'action, de la meilleure manière qui soit. Il arrive à nous captiver pour plusieurs histoires parallèles, sans jamais que l'une d'elles vienne parasiter l'autre.

A l'inverse, on peut citer la série TV de Dragon Ball, où le découpage abominable casse complètement la narration, à un tel point qu'on se demande si c'est pas fait exprès. Dans les deux cas, c'est un réel manque de goût...


Comment ne pas mentionner les superbes plans fixes, dessinés par Sugino, pour marquer les moments forts de l'épisode ? C'est d'ailleurs le dernier plan de la majorité des épisodes de Dezaki, toutes séries confondues.

Ces crayonnés ponctuent une scène de façon magistrale, soit en plein milieu d'une scène d'action, soit pour accentuer l'expression d'un visage :

Lady Oscar :
    

   

     


Très cher frère 

    

 

 
  COBRA

 

 

 Joe
  

Ils sont devenus au cours des années la marque de fabrique du duo Dezaki/Sugino, et ont été mille fois imités sans jamais être égalés, dans Olive et Tom par exemple.

 

 

AUTRES EXEMPLES 

Parmi les "Dezakeries", citons aussi :

-l'image partagée verticalement en 2 pendant un dialogue :

           

   Oscar & André                                   Reika & Ranko

-la répétiton d'une même scène importante (en général 3 fois), telle la scène de la gifle d'Oscar à André EP. 28.

-la digitalisation (effet écran TV analogique avec peu de définition) :

                              

-l'éclairage par rayons lumineux obliques :


   

-Les couchers de soleil surdimensionnés :

 

Joe                                                              Lady Oscar



-Le vol de colombes (généralement ponctué d'un crayonné) :

     

-Les vitraux, pour donner un côté solennel :

   

La Reine des neiges                            Rémy sans famille                               Lady Oscar

 


CONCLUSION 

Je ne peux conclure sans citer ici ma phrase de référence : en matière de dessin animé, il y a Dezaki/Sugino, et plus loin, les autres.

Leurs réalisations font honneur au genre du dessin animé, et leur intervention sur Lady Oscar démontre sans détour la puissance de leur travail : ils ont arraché cette série aux contraintes de son époque (épisodes 2 à 18)pour en faire une oeuvre complètement intemporelle qui ne se démodera jamais.

Car, à l'image de Ridley Scott et de son "Blade Runner", les anime de Dezaki/Sugino traversent les modes et les époques, sans jamais les subir. Le syndrôme du kitsch leur est inconnu.

Il faut souhaiter qu'au-delà de la reconnaissance des fans, le monde entier ouvrira un jour les yeux sur la grandeur de leur talent, pour leur donner la notoriété qu'ils méritent.

 

 
 
 
Commentaires
 
 

 3. Rosalie de Jarjayes Le 22/06/2010 à 17:01

Je ne suis pas d'accord avec Sanna75, je trouve personnellement le design de la première partie de la série très enfantin, trop rond et les personnages y sont moins beaux. Dans la deuxième partie ils sont d'une beauté incroyable, et les yeux d'Oscar sont sublimisssimes. Surtout dans la scène du tableau.La qualité des dessins est bien meilleure que dans les premiers épisodes, où c'était pas toujours top.
Le miroir c'est normal que ça soit différent, c'est pour faire un effet de reflet !
La première partie est trop étoiles-fleurs-bulles trop shojo rêverie, la deuxième se détache bien d'Ikeda et de la mièvrerie de son esthétique.
 

 2. Sanna75 Le 22/06/2010 à 13:31

Ah je comprends mieux pourquoi l'épisode 1 me plaît autant! C'est l'un de mes préférés!
Mais je dois dire que j'aime aussi la Oscar des ép 2-18 car sa beauté (tant intérieure qu'extérieure)y est bien rendue. Et elle a une sorte de douceur, de tendresse, (de rondeur même) dans les traits, ce qui lui va très bien vu les évènements et ce qu'on apprend petit à petit sur son caractère (loyale, dévouée, entière...)
En fait, ça colle bien avec l'âge des personnages aussi. 
Et puis j'aime beaucoup la façon "très soignée" dont ils ont dessiné les yeux d'Oscar, surtout dans les moments d'émotion (ép8 ou ép12...)
Après, évidemment il y a comme une impression de "figé" dans le dessin...
Avant de connaître les détails de la réalisation de la série, j'avais cru que ce changement était voulu de la part de l'équipe pour "accompagner" l'évolution d'Oscar : son avancée dans l'âge, sa souffrance... c'est vrai que les dessins 2ème réalisation collent plus à l'ambiance dramatique du scénario. Inutile de dire que c'est superbe!
Mais évidemment le changement s'est fait brutalement à une même période de l'histoire donc les persos changent subitement de visage et tout, hihi...
Au fait, quelquefois il y a des dessins inhabituels (2ème réalisation), comme si c'était des "brouillons": je ne sais plus c'est dans quel épisode où Oscar est devant un miroir et André derrière elle. Là ils n'ont pas du tout leurs visages habituels...
Que j'aime apprendre de nouvelles choses sur cet animé!
Oups ce commentaire n'est pas très objectif mais c'était irrésistible !
 

 1. vang Le 27/12/2009 à 14:53

C'est vrai que sans eux je ne verrais pas Lady Oscar ou encore Très cher frere du même oeil. Je me rapelle avoir suivie les épisodes le Lady Oscar à la télé mais sans jamais trop m'y accrochée au début, jusqu'au moment où je découvre enfin Oscar, je dirais vers l'épisode 20. 
Ils forment un très bon couple professionnel, c'est indéniable mais de la à dire que personne ne peut être à leur hauteur c'est un peu exagérait. Oui jusqu'à présent je ne vois pas....faut dire que je ne suis pas très anime non plus... mais qui sait peut-être dans le futur...on ne sait jamais il ne faut jurer de rien.
Un grand merci à ton travail, qui m'a été très profitable et très intructif.
Continue sur ta lancé.
 
 

 

 
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